Le mois dernier, Musitechnic a eu la chance d’accueillir une présentation du fabricant de microphones à ruban Royer Lab. J’en profite pour revenir sur les microphones à ruban. Sans répéter ce qui a été dit par le présentateur John Jennings (vice président de ventes et marketing chez Royer Lab), je vais revoir pourquoi les microphones à ruban sont incontournables, leur place dans l’histoire, ainsi que les mythes et réalités qu’on attribue aux microphones à ruban, mais surtout on verra pourquoi choisir un microphone à ruban plutôt qu’un condensateur ou un microphone à bobine mobile. La prochaine fois je fournirai quelques exemples audio pour que vous constatiez par vous mêmes.

Histoire

Pourquoi cet engouement pour les microphones à ruban? Les microphones à ruban ont été très populaires parce qu’à l’époque ils étaient meilleurs que les microphones à bobine mobile disponibles. Dans les années 1950, les microphones à condensateur ont pris le dessus. Ils offraient un son supérieur sans les désavantages des microphones à ruban. Ces derniers, nécessitant de gros aimants, étaient encombrants. Certains de ces aimants, comme sur les classiques RCA 44, pesaient 6 livres! Le microphone à ruban est extrêmement fragile. Le ruban, mesurant moins de 2 micromètres en épaisseur, est en suspension entre les aimants afin de capter les ondes sonores. Le moindre excédent d’air peut le faire déchirer. Les inconvénients ne s’arrêtent pas là, puisqu’on nécessite aussi un encombrant transformateur pour convertir le signal du microphone à un niveau de voltage utilisable et même là, le voltage de sortie du microphone reste faible.

Mythes et réalités de nos jours

Les microphones à ruban n’ont jamais vraiment disparu, mais dans les dernières années les avancements dans la technologie leur ont permis de se refaire une place sur le marché des microphones. Les aimants néodyme (« neodymium ») (de la taille d’une pile AAA) permettent de faire des microphones plus petits. Les transformateurs audio sont maintenant de meilleure qualité et mois bruyants. En plus, les microphones à ruban actuels peuvent soutenir plus des dBSPL (sons plus forts) que ceux de jadis. En général les microphones à ruban n’ont pas besoin d’alimentation fantôme. La plupart des nouveaux modèles peuvent recevoir sans problème ce 48V de courant continu qui aurait détruit un modèle plus ancien. Tous ces éléments contribuent à faire des microphones à ruban une option intéressante pour les enregistrements studio ou même pour le « live ». Il n’est toujours pas bon de souffler directement dans le microphone mais c’est possible de le placer devant un amplificateur de guitare ou l’utiliser pour enregistrer une batterie. Il faut être prudent lorsqu’on s’en sert pour une grosse caisse (« bass drum ») mais selon John Jennings, si on pivote le microphone vers le bas, le ruban en angle est plus en mesure d’absorber le choc de l’air et donc permet de se rapprocher d’avantage de la grosse caisse.

Quand devrait-on utiliser un microphone à ruban?

On peut imaginer que la réponse est : « Ça dépend ». Il est vrai qu’il n’y a pas de microphone parfait comme il n’y a pas de position parfaite non plus. Alors quand est-ce opportun d’utiliser le microphone à ruban? Un microphone à ruban est doux dans les aigues, est généralement bidirectionnel et offre une bonne réponse en fréquence, à la fois en axe et hors axe.

Réponse en fréquence

Le son que produit un microphone à ruban est souvent décrit comme soyeux, comme si le microphone mettait une couverture sur tout. Le ruban semble atténuer légèrement les aigues quand on le compare à un microphone à condensateur. Ceci est du à la fréquence résonante de la membrane. Les microphones à condensateurs ont un diaphragme tendu avec une fréquence résonante autour de 1kHz tandis que le ruban dans un microphone à ruban est peu tendu. Par exemple, les Royer ont une fréquence résonante de 40Hz. Par conséquent les condensateurs amplifient naturellement les fréquences aigues (parfois de façon agressive) et les rubans non. Quand vous souhaitez un son chaleureux pour un enregistrement vocal, un microphone à ruban peut offrir cela (c’était le microphone d’Elvis Presley). Si vous avez besoin d’un microphone qui va adoucir une source sonore aigue agressive, comme une guitare électrique, un microphone à ruban peut faire cela aussi. Eddie Kramer en a utilisé (Beyer M160) pour les amplificateurs de guitare de Jimi Hendrix. Comme microphone ambiant (« room mic ») il fournira une réverbération douce. Le choix de microphone judicieux pour la situation peut (devrait) vouloir dire moins (ou pas du tout) d’égalisation (« EQ »).

Bidirectionnel

Le microphone à ruban classique est, par définition, bidirectionnel (figure huit) même si d’autres motifs polaires sont possibles. Les deux faces du ruban sont exposées au son (0º et 180º) mais le son venant des côtés (90º) est grandement rejeté. L’application la plus évidente est de capter deux sources (des chanteurs par exemple) ou d’enregistrer une source d’un bord et la réverbération naturelle du lieu de l’autre. Par prolongement, utiliser une paire de rubans pour un enregistrement stéréo (le ruban est le microphone de choix la technique stéréophonique Blumlein).

Réponse hors axe

La réponse hors axe du microphone est importante et l’ingénieur du son en herbe néglige souvent celle-ci, se concentrant surtout sur la réponse en axe. La conséquence est que tout débordement (« leakage ») des autres sources (tel que des musiciens) dans le microphone n’aura pas un bon son et ces interférence agiront de façon négative sur le son général. Tel que le précisait John Jennings, « le coulage (« leakage ») est bon lorsqu’on a une bonne réponse hors axe », et c’est le cas pour la plupart des microphones à ruban. Puisqu’il est bidirectionnel on s’attend à ce que le son de l’arrière (180º) soit également linéaire. À 90º (et à 270º) le son est annulé. À 45º nous sommes hors axe et la réponse en fréquence reste la même rendant le microphone idéale en configuration stéréo XY (couple coïncident). En XY, les deux capsules des microphones sont à un angle de telle sorte qu’une source sonore au centre le la scène est à 45º pour un des microphones et à 315º pour l’autre. Que ce soit en stéréo ou en mono, la réponse inchangée hors axe peut agir comme une réverbération qui cimente le tout.

Afin de mettre en contexte ces aspects techniques, la prochaine fois je fournirai quelques exemples audio pour que vous puissiez constater par vous même le son des microphones à ruban et comment ils peuvent vous être utiles.

Questions et commentaires? k.blondy@musitechnic.net

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